De Loïc Locatelli Kournwsky
Editions Vide Cocagne, 76 pages
Canis Majoris, la plus grande étoile de l’univers. Celle qui « de là-haut (…) nous regarde, (…) nous toise. Elle rit de nous et doit trouver bien ridicule la vie des êtres humains » (page 67). Canis Majoris, juge et témoin de ce récit. Un roman graphique intime qui révèle un pan sensible de l’édifice humain. Une architecture ébranlée dans son équilibre émotionnel et psychologique, mise à mal par la confrontation avec un imprévu. Très vite tout s’effondre, s’écroule sans ordonnancement dans un grand fracas chaotique, submergeant le héros.
Un soir d’hiver, à la sortie d’un banal repas familial, la vie de Dimitri va chavirer. Sans que l’on sache la raison sa tante va mettre fin à ses jours. Le choc est rude pour celui qui fut le dernier à lui parler, à s’inquiéter de sa santé. Comment peut-on, ou doit-on vivre après cette tragédie ? Car de l’autre côté, il y a la culpabilité tenace et tacite du survivant, les démons qui rongent et dévorent les nuits, qui s’emparent des rêves et des cauchemars, étalant ses tentacules dans les entrailles du subconscient. " Au final le mort s'en fout. Ce sont les vivants qui souffrent tu sais. Ils vont essayer de vivre normalement, ils vont faire semblant, même pour des gestes simples. Mais ils s'écrouleront tous, à un moment ou à un autre" (page 34). Le deuil, Dimitri doit se battre pour y faire front. Entre tristesse et regret, doute et culpabilité, impuissance et colère, le jeune homme erre sans repères, aspirant secrètement pouvoir manipuler le temps et remonter jusqu’à la source du mal pour éradiquer ses souffrances, ses tenaillements, insister davantage, parler avec elle… Loïc Locatelli met son dessin noir et blanc au service d’un conte onirique, qui sans jamais tomber dans le pathos ou le mélodramatique gratuit, sans verser dans le larmoyant insuffle parfois une touche de poésie à ce sujet grave et difficile qu’est le suicide d’un proche. Entre présent et passé, entre réel et fantastique, Canis Majoris nous invite à voyager dans les méandres de l’âme.
Lu dans le cadre La Voie des Indés 2013. Merci Libfly et Vide Cocagne pour ce partenariat.