De Éric-Emmanuel Schmitt
Édition Albin Michel, 114 pages
Qui n'a jamais croisé sur sa route, au grè d'un voyage ou d'une ballade, un cerbère accort camouflé derrière un seyant sarrau pastel? Dernier rempart avant l'affranchissement, qui vous toise d'un œil inquisiteur tout en jetant concomitamment un regard concupiscent vers le lieu du délit tant désiré, attendant le moment opportun pour vous éructer dans un galimatias, sorte de long cri plaintif, dolent et caverneux: " C'est vingt centimes et salissez pas mon travail!"
Puis, libérant les portes des latrines, vous pousse chaleureusement à vider votre vessie aussi vite que votre porte-monnaie.
Madame Ming, bien loin de ces clichés, est dame-pipi dans un grand hôtel chinois. Elle a de faux airs de Renée, la concierge de l'Élégance du hérisson, notre honorable vieille dame, un soupçon de sapience en plus. Normal, me direz-vous pour cette héritière de Confucius. Oui, mais la sagesse a des limites, car cette dépositaire des vespasiennes possède une richesse singulière dans cette Chine moderne: elle est la mère de dix enfants.
Entre rêve et réalité, entre mensonge et vérité, Madame Ming cherche à distiller le juste équilibre par le biais de ses maximes et de ses fables. Même si ce n'est pas le meilleur Éric-Emmanuel Schmitt, on passe un agréable moment en compagnie de cette dame-pipi philosophe et garante d'un art de vivre fait d'utopie et de plaisirs simple. Ce sixième volet du cycle de l'invisible poursuit sa quête de spiritisme, de richesse intérieure.
Citations:
" Au lieu de se plaindre de l'obscurité, mieux vaut allumer la lumière " (page 8).
" Le silence est un ami qui ne trahit jamais " (page 91).